Par RaySoleil
Étant naturiste de longue date, j’ai accepté, depuis longtemps, mon corps avec ses qualités et ses défauts, ce qui fait que je suis très à l’aise d’être nu en compagnie d’autres personnes ou simplement, pour vaquer à mes occupations quotidiennes, quand je suis chez moi.
Il est certain que je rêverais, par des belles et chaudes journées d’été, d’aller prendre le transport en commun pour me rendre au travail, uniquement vêtu de mes chaussures, avec ma boîte à lunch sur l’épaule; d’aller faire mes courses, d’aller me baigner à la piscine de mon immeuble, de prendre un bain de soleil sur les Plaines d’Abraham pendant mon heure de lunch, totalement nu. Cela relève toutefois du fantasme, car la réalité est bien différente.
Je suis d’accord qu’il y a des circonstances qui se prêteraient à la pratique du naturisme si notre société était plus ouverte à notre mode de vie. Par contre, même pour un naturiste pur et dur, il est évident qu’il y a lieu d’exercer son jugement, par souci de respect envers la majorité des gens qui n’ont pas, pour toutes sortes de raisons, le désir d’expérimenter le naturisme.
Quand on dit que la liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres, il n’y a rien de plus vrai. Malgré le fait que je sois très bien nu, je n’oserais jamais faire quoi ce soit qui pourrait indisposer mes voisins ou mon entourage, en leur imposant ma nudité, pour le seul principe de liberté et du fait que je puisse faire ce que je veux chez moi.
C’est effectivement le cas : je suis libre chez moi, mais dans la mesure où on ne me voit pas. Il ne s’agit pas de me cacher, mais il y a, socialement, des limites à s’imposer, à la base du respect de chacun.
Certains persistent dans leur entêtement, tout en se fichant des voisins, et ce sont précisément ces individus qui nuisent à la réputation du naturisme auprès du grand public.
Vous vous rappellerez sans doute de cet homme de Repentigny qui a déclenché une véritable tempête dans son voisinage en se promenant nu sur son terrain ou à l’intérieur, toutes fenêtres ouvertes. Cet événement, très médiatisé, s’est terminé en cour, alors que l’individu a perdu sa cause laissant, au grand public, une bien piètre image des naturistes.
Ceux et celles qui ont suivi un récent procès pour nudité publique en Ontario sont en droit de se questionner si le fait de se promener nu sur le bord d’une autoroute, de conduire sa voiture nu pour aller au service au volant d’un établissement de restauration rapide ne constitue pas simplement de la provocation, même si, au départ, la nudité simple n’a rien d’indécent.
Que dire de cet homme de Grande-Bretagne, surnommé The Naked Rambler (le randonneur nu), qui collectionne les arrestations et les accusations pour nudité publique et qui a même fait de la prison à plusieurs reprises pour cette raison. Finalement, au Lac Meech, lieu traditionnellement reconnu comme naturiste depuis plus de 80 ans, maintenant sous haute surveillance par les autorités du Parc de la Gatineau parce que certaines personnes n’ont pas hésité à se pavaner hors des zones généralement fréquentées par les naturistes, ce qui a suscité des plaintes de la population.
On a aussi tendance à utiliser la nudité pour promouvoir toutes sortes de choses, parfois au détriment du naturisme lui-même. On se souvient des étudiants, pendant le Printemps érable, en 2012, qui ont décidé de manifester, partiellement ou totalement nus, au centre-ville de Montréal; des organismes comme PETA (People for the Ethical Treatment of Animals) qui organisent des manifestations, partout le monde, alors qu’on se met tout nus, enduits de ketchup, pour symboliser les mauvais traitements réservés aux animaux; il ne faut pas oublier FEMEN, ce groupe contestataire féministe, originaire d’Ukraine, manifestant généralement les seins nus, dont le combat central est la promotion des droits des femmes tout en s’intéressant à d’autres causes, plus ou moins liées au féminisme. Rappelez-vous également de la campagne Centraide, il y a quelques années, qui utilisait la nudité pour sensibiliser les gens à la pauvreté.
Je dirais que, même le vélo-nu, qui a lieu dans plusieurs pays du monde pour manifester contre le pétrole et les gaz à effet de serre, demeure, malgré tout, discutable. La preuve : la FQN, même si elle annonce l’événement, ne le supporte pas officiellement.
Toutes ces actions, réalisées par des individus ou des groupes, n’aident vraiment pas la cause naturiste. Dans ce contexte, les « textiles » se disent certainement que les naturistes ne sont que des extrémistes, des exhibitionnistes, des pervers et des entêtés qui n’ont aucun respect pour autrui.
Quand aurons-nous droit, au Québec, à un plan de promotion intelligent qui fera ressortir l’essence réelle du naturisme, le caractère sain et bienfaisant de ce merveilleux mode de vie accessible à tous. L’éducation populaire est un élément essentiel à la survie du naturisme et il faut s’y attaquer dès maintenant.
En matière d’éducation au naturisme, je vous dirais que j’ai été très impressionné, lors d’un séjour en Floride, par les interventions de la South Florida Free Beaches / Florida Naturist Association. Cet organisme travaille à l’obtention d’une part équitable des plages publiques et autres lieux appropriés pour la pratique du naturisme en Floride, y compris la désignation de zones Clothing Optional, de façon à définir un modèle de plage naturiste en milieu urbain.
Cela nous prouve que, même en milieu hostile au naturisme, il y a des façons intelligentes et cohérentes d’agir, sans confrontation, ni provocation. Nous aurions tous avantage à nous en inspirer.


